• Femmes SDF, femmes capitales

    Femme sdf (interêt-general.info) 

    Les femmes sans domicile fixe de Paris ne cultivent par l'art de rue mais l'art de vivre dans la rue. Atteintes de troubles psychiques, violentées par leur conjoint, sans-papiers ou encore trop âgées pour travailler, ces femmes désemparées affrontent chaque jour la rudesse des trottoirs et le mépris des passants. Nuit et jour, sous la menace de la gente masculine, elles doivent lutter pour se loger, se nourrir et rester présentables, comme de vraies femmes. Dans un pays soi-disant riche, quel est l'avenir des ces âmes qui errent dans les rues de la capitale ? Enquête.

    Dans une salle à manger entourée d’autres femmes qui jouent aux dés, nous découvrons Rosetta accoudée à une table. La quarantaine entamée, simplement vêtue, elle ne parle pas français. Mais pour la musique on peut lui faire confiance, c’est elle qui choisit les chansons à mettre dans le radiocassette de la Halte des femmes, pour le bonheur de ses voisines.

     Plus nombreuses qu’il y a dix ans, 48% des femmes sdf ont entre 18 et 30 ans(selon l’INSEE, chiffres  de 2009). Une femme sur trois est accompagnée d'enfants. 45% ont entre 31 et 50 ans et 6% ont entre 51 et 64 ans. Les plus de 65 ans ne représentent que 1%.

    Qui sont-elles ? De nationalité française ou d’origine étrangère, ces femmes qui vivent dans la rue ont perdu leur travail et ne parviennent pas à en trouver un autre ; ont fuit le domicile conjugal ; ont été rejetées par leur famille ; ou bien elles sont tout simplement sans papiers, atteintes pour la majorité de troubles psychiques. 

    Survivre au quotidien ? Dans la rue il faut d'abord trouver un endroit où dormir : un trottoir, un feu rouge, un hall d'immeuble, un parking. A la fois un endroit sec et  chaud, pour prévenir de la pluie et de la neige l’hiver. Mais quelque part où on ne les verra pas, loin des métros et des squares (en général). Pour se protéger des agressions physiques et sexuelles, les femmes sdf s'isolent des hommes, certaines s'habillent comme eux, se négligent, s'oublient elles-mêmes. Pour se faire respecter auprès du sexe opposé avec qui elles cohabitent dans un même quartier, elles s'efforcent de ne pas boire d'alcool. En restant éveillées elles ne craignent rien. Mais bien souvent la tentation est trop grande. Vulnérables et dépressives, l'alcool à raison d'elles, les viols augmentent, les morts aussi.

    Face à la rudesse de la rue et sa violence, de plus en plus de femmes se réfugient auprès du 115 (Samu social), d'EMMAUS, des CHRS*  ou bien des CHU** comme la Halte des femmes, près de la Gare de Lyon. Là-bas elles sont prises en charge, nourries, logées notamment pendant les périodes de grand froid et surtout, en sécurité.

    Ensuite le matin, le midi et le soir, trouver de quoi manger : soit auprès des associations, des Restos du cœur (trois fois par semaine) ou dans les poubelles des supermarchés. Pour se laver c'est simple, il y a les toilettes des cafés, toujours les centres d'hébergement où elles peuvent prendre une douche et en dernier recours, les toilettes publiques plutôt utilisées par les hommes. Côté garde-robe, elles se dirigent vers EMMAUS métro Javel ou bien près des grands magasins parisiens en période de déstockage.

    Etre femme sans domicile fixe à Paris, c’est vivre dans la honte d’une dignité perdue, vivre loin des ses enfants placés dans des foyers ou restés « au pays ». Vivre dans la rue c’est à la fois tout abandonner et tout reconstruire, une maison, une vie, un être. Vivre dans la rue c’est compter sur soi-même plus que sur les âmes charitables qui se font de plus en plus rare. Survivre contre l’exclusion sociale et l’égocentrisme humain, survivre face au temps qui court. Car « Sans femmes il n’y a pas de vie » (paroles de femme).

    * centres d'hébergements et de réinsertion social

    ** centres d'hébergement d'urgence

     

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